Issy-les-Moulineaux / Lille

La chronique fiscale du 17 Mai 2021


Cette chronique fiscale est co-rédigée par les étudiants du Master Droit Fiscal et Vie de l’Entreprise de l’Université Catholique de Lille, sous la direction de M. Simon Daragon (Maître de conférences en Droit Fiscal)


SOMMAIRE

L’OCDE souhaite plus d’équité fiscale en droit des successions/Dernier délai pour bénéficier du dispositif d’exonération des droits de donation/Biens immobiliers en démembrement : qui est redevable de l’IFI ?/Les commentaires de l’administration fiscale sur les cessions de locaux professionnels transformés en logements


L’OCDE souhaite plus d’équité fiscale en droit des successions

  • Dans son rapport du 11 mai, l’OCDE dénonce la faiblesse des recettes fiscales liées aux successions et donations des différents États et les inégalités sociales qui en découlent. Aussi, une imposition plus importante des donations et successions conduirait à un gain massif d’argent public.
  • Pour rappel, seulement 24 pays sur les 37 faisant partie de l’OCDE lève un impôt sur cette catégorie de revenus. De plus, les impositions liées aux successions et donations de ces 24 États représentent en moyenne 1% de leurs recettes fiscales.
  • L’OCDE a donc formulé des recommandations pour que ces opérations soient imposées plus efficacement et équitablement. Elles s’articulent autour de plusieurs axes :
    • Taxer les transmissions de patrimoine en fonction du montant de patrimoine précédemment reçu par le bénéficiaire ;
    • Instaurer un barème progressif global pour l’impôt sur le patrimoine, comme c’est le cas en France ;
    • Rapprocher les taux d’impositions entre parents proches et éloignés et exonérer de droits de succession des petits patrimoines ;
    • Encourager les donations aux jeunes générations ;
    • Supprimer les avantages de l’assurance vie et réduire les montants d’abattements en cas de rotation rapide.
  • Les objectifs prépondérants de ces recommandations sont explicites : réduire les inégalités sociales en renforçant la fonction redistributive de l’État, mais également limiter les stratégies d’optimisation fiscale.
  • Il est toutefois important d’avoir à l’esprit que ces recommandations n’ont pas une portée juridique obligatoire. Les États restent donc libres de s’y conformer ou de conserver les dispositions en vigueur.

 

Olivia Tari

Dernier délai pour bénéficier du dispositif d’exonération des droits de donation

  • La loi de finances rectificative pour 2020 a mis en place un dispositif supplémentaire d’exonération des droits de donation. Ce dernier est temporaire et prendra fin le 30 juin 2020. Il permet de transmettre jusqu’à 100 000 € à un ou plusieurs membres de la famille.
  • Cette donation doit s’effectuer sous forme d’argent. Elle peut être destinée à un enfant, petit-enfant ou arrière petit-enfant. A défaut, la somme pourra être transmise aux neveux ou nièces de sang.
    Le dispositif est limité à trois types de projets :

    • Financement destiné à la construction de la résidence principale ;
    • Financement de travaux de rénovation énergétique, affectés à la résidence principale dont le donataire est propriétaire (travaux éligibles à la prime de transition énergétique) ;
    • Financement d’une entreprise pour une souscription au capital initial ou une augmentation de capital.

Pour cela, l’entreprise doit respecter certaines conditions :

    • Petite entreprise de moins de 50 salariés ;
    • Chiffre d’affaires annuel de moins de 10 millions d’euros ;
    • L’activité est exercée depuis moins de 5 ans ;
    • L’entreprise n’a pas encore distribué de bénéfices ;
    • La direction est assurée par le donataire pendant une durée minimale de 3 ans à compter de la souscription.

Pour que la donation soit valable, les sommes doivent être remployées dans les trois mois suivants leur perception. Cette donation est d’ailleurs cumulable avec les autres dispositifs existants.

 

Eugenie Dourthe

Biens immobiliers en démembrement : qui est redevable de l’IFI ?

  • Les règles applicables en matière d’impôt sur la fortune immobilière (IFI) varient selon l’origine du démembrement de propriété.
  • Quand l’usufruit appartient à une personne et la nue-propriété à une autre, c’est normalement l’usufruitier qui doit payer l’IFI (logique puisqu’il en tire le bénéfice). L’IFI est calculé sur la valeur de la pleine propriété, l’usufruitier ne pouvant se prévaloir d’aucune diminution d’impôt du fait de sa situation juridique.
  • Il existe cependant des exceptions relativement fréquentes et peu connues qui découlent de la source du démembrement :
    • Dans le cercle familial, si l’usufruit est attribué au conjoint survivant au titre de ses droits dans la succession, il revient à la fois à l’usufruitier et au nu-propriétaire de déclarer à l’IFI la valeur de son droit d’après le barème légal.Exemple : pour un bien de 2 000 000 €, si l’usufruitier a 67 ans, il doit déclarer 40% soit 800 000€, et le nu-propriétaire le reste soit 1 200 000 €.
      A l’inverse, si l’usufruit est issu d’un testament ou d’une donation au dernier vivant, l’usufruitier est le seul à être redevable de l’IFI.
      Le choix effectué par le conjoint survivant de se prévaloir de son usufruit légal ou d’une disposition testamentaire en sa faveur influe donc sur l’imposition future du groupe familial.
    • A l’extérieur du cadre familial, l’imposition est partagée entre usufruitier et nu-propriétaire, dès lors que le démembrement tire son origine d’une vente avec réserve d’usufruit, notamment lors d’une vente en viager occupé.
      La situation inverse n’est pas possible. En effet, la cession de l’usufruit permet donc au nu-propriétaire d’échapper à l’IFI, ce qui vient encourager par exemple la donation d’un usufruit temporaire à une fondation ou une association d’utilité publique.

Il faut donc retenir qu’au moment d’une succession, il peut être intéressant de faire jouer ou non une donation au dernier vivant selon la situation respective des enfants et du conjoint face à l’IFI.
Enfin, la donation d’un usufruit temporaire au profit d’une association constitue un moyen efficace de faire baisser son IFI.

 

Cyril Bensid

Les commentaires de l’administration fiscale sur les cessions de locaux professionnels transformés en logements

  • La loi de finances rectificative pour 2011 a instauré un régime favorable relatif aux plus-values réalisées en cas de cession de locaux professionnels, plus particulièrement en cas de cessions de locaux à usage de bureaux ou à usage commercial ou industriel, réalisées par les personnes morales soumises à l’impôt sur les sociétés. Ce dispositif s’applique également en cas de cession de terrain destiné à la construction de locaux d’habitation.
  • Ainsi, l’article 210 F du Code général des impôts précise que ces plus-values sont soumises à un taux réduit de 19%. Afin de bénéficier de ce régime de faveur, l’acquéreur du local doit s’engager à transformer celui-ci en local à usage d’habitation dans un délai de 4 ans.
  • La loi de finances pour 2021 a modifié ce régime. D’une part, elle offre la possibilité à l’acquéreur du local ou du terrain de demander une prolongation exceptionnelle du délai de 4 ans pour une durée d’un an renouvelable une fois. D’autre part, elle prolonge ce régime de 2 ans, ouvre ce dernier à l’ensemble des personnes morales (qu’elles soient assujetties ou non à l’impôt sur les sociétés) et diminue l’amende en cas de non-respect de l’engagement de l’acquéreur de transformer le local acquis en un immeuble à usage d’habitation ou de construire des locaux d’habitation sur le terrain dans les quatre ans qui suivent la date de clôture de l’exercice d’acquisition.
  • L’administration fiscale a confirmé ces modifications et apporte des précisions sur la possibilité de prolonger le délai de transformation ou de construction. En effet, elle indique que la prolongation exceptionnelle de ce délai s’applique uniquement aux engagements pour lesquels l’achèvement des travaux doit intervenir à compter du 1er janvier 2021.

 

Gurkan Polat

Article édité le 17 mai 2021